De retour de Frieze Masters Londres, nous souhaitions vous faire découvrir l’un de nos lieux préférés de la capitale anglaise : la Wallace Collection. Constituée progressivement par cinq génération de marquis de Hertford, elle est ouverte au public depuis 1900.
Le 1er marquis de Hertford, Francis Seymour-Conway (1718−1794), acquiert les premiers objets de la collection dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Son fils, Francis Ingram-Seymour-Conway (1743−1822), 2e marquis de Hertford, achète à son tour quelques objets, et fait de Manchester House sa principale résidence londonienne en 1797. La Wallace Collection y est toujours abritée aujourd’hui. Le 3e marquis de Hertford, Francis Charles Seymour-Conway (1777−1842) est le premier véritable collectionneur de la famille. Personnage flamboyant et très influent, il est l’ami intime du prince Régent, qu’il conseille pour l’acquisition d’œuvres d’art ou pour la décoration de ses demeures. En 1798, Francis Charles épouse Maria Fagnani, riche héritière qui fait des Hertford une des familles les plus fortunées d’Angleterre. Le goût déjà cultivé des marquis et leur puissance financière permet alors aux deux générations suivantes de donner toute son ampleur à la collection.
Richard Seymour-Conway (1800−1870), 4e marquis de Hertford, est élevé en France par sa mère Maria. Il devient vers le milieu du XIXe siècle le plus grand collectionneur de Paris, et rassemble dans son hôtel particulier rue Laffitte, au pavillon de Bagatelle dans le bois de Boulogne, ainsi qu’à Hertford House à Londres, une collection remarquable. Sa passion pour l’art le pousse à acheter, parfois au prix fort, les œuvres les plus exceptionnelles, parmi lesquelles Persée et Andromède de Titien, le Paysage avec arc-en-ciel de Pierre-Paul Rubens ou le Cavalier riant de Frans Hals. Il est assisté par son fils illégitime, Richard Wallace (1818−1890), qui continue à acheter des œuvres importantes après la mort de son père. La très grande majorité des 5 500 pièces qui constituent aujourd’hui la collection est ainsi acquise par les deux hommes entre 1843 et 1872. En 1870, Richard Wallace rachète Hertford House et s’y installe deux ans plus tard. Il y compose une première scénographie muséale, et ouvre la maison aux visiteurs un jour par semaine. Sans héritier, Wallace lègue sa collection à son épouse qui la donne à son tour à la nation britannique en 1897.
La Wallace Collection reflète le goût affirmé des Hertford pour le XVIIIe siècle français. Richard Seymour-Conway apprécie particulièrement les peintres de cette période, notamment François Boucher, Antoine Watteau et Jean-Baptiste Greuze. Son goût pour les sujets riants, légers et sensuels détermine ses choix et son amour pour le siècle des Lumières. Les arts décoratifs de cette période sont également largement représentés dans la collection. L’engouement pour ces objets se renforce dans les années 1840, après s’être ralenti pendant la Révolution française et les premières décennies du XIXe siècle. Sous l’impulsion du 4e marquis de Hertford, et de son concurrent collectionneur James de Rothschild, le XVIIIe siècle devient alors le goût par excellence des grandes fortunes.
Parmi les chefs‑d’œuvre du XVIIIe siècle de la collection, nombreux sont ceux dont la provenance est remarquable. La commode réalisée par Antoine Robert Gaudreaus (vers 1680–1746) et Jacques Caffieri (1678−1755) et livrée en 1739 pour la chambre du roi à Versailles, est l’un des meubles royaux les plus importants du XVIIIe siècle, acquis par le 4e marquis de Hertford en 1865. Ce dernier possède encore plusieurs meubles livrés pour la reine Marie-Antoinette dans ses diverses résidences, et quelques objets provenant des collections de la marquise de Pompadour. Certaines des plus belles réalisations des marchands merciers du XVIIIe siècle se trouvent également dans la collection, comme cette écritoire en laque datant du règne de Louis XV. Elle est orné de bronzes dorés au C couronné, finement ciselés et animés de courbes rocaille. Une autre écritoire sur ce modèle est connue, anciennement dans les collections de la galerie Léage.
Depuis son ouverture en 1900, la Wallace Collection offre aux visiteurs l’une des plus grandes collections d’arts décoratifs du XVIIIe siècle. Elle contribue de manière importante à leur rayonnement, et est aujourd’hui un acteur déterminant dans l’enrichissement des connaissances sur cette période.
Bibliographie :
Stephen Duffy, Rosalind Savill, Eleanor Tollfree, The Wallace Collection, Scala Publishers, 2005
Suzanne Higgott, Sir Richard Wallace : Connoisseur, collector & philanthropist, The Wallace Collection, 2018
Peter Hughes, The Wallace Collection catalog of furniture, Paul Holberton Publishing, 2013
FRIEZE MASTERS 2024
Nous avons été ravis de vous retrouver nombreux à Frieze Masters Londres la semaine dernière. Pour ceux qui n’ont pas pu nous rejoindre, petit retour en image sur notre stand.